Parents inquiets…Le sommeil de votre enfant est plus important que vous ne le pensez!
Avez-vous l’impression que les stratégies mis en place auprès de vos enfants sont inefficaces pour diminuer leur anxiété, problèmes de comportements, difficultés d’attention, symptômes dépressifs ou autres? Si tel est le cas, pensez sérieusement à évaluer les habitudes de sommeil. Un déficit de sommeil conduit à énormément de difficultés et participe à l’apparition, au maintien et même à l’augmentation des symptômes pour lesquels vous consultez.
Sans exagérer – et sans être une vraie étude statistique – je dirais que plus de 50% de mes client-es des 10 dernières années sont en déficit de sommeil important. Par important, je veux dire qu’il manque 2 à 3 heures de sommeil par nuit par rapport à la recommandation de leur groupe d’âge. D’ailleurs, ces client-es consultent pour des problèmes qui ne concernent pas le sommeil : problèmes d’attention, dépression, anxiété, problèmes de comportements, perte de motivation scolaire, etc.
Voici deux portraits (une adolescente et un enfant) que j’ai accompagné en clinique dans les dernières années et les interventions mises en place. Tout d’abord, voici en rafale quelques problématiques associées à un manque de sommeil :
- ? Diminution des capacités d’attention : Un manque de sommeil réduit la capacité à se concentrer et à maintenir l’attention sur une tâche.
- ? Augmentation de l’anxiété : Le déficit de sommeil peut exacerber les symptômes d’anxiété, rendant plus difficile la gestion du stress quotidien.
- ?️ Altération de l’humeur : Un sommeil insuffisant peut provoquer de l’irritabilité, des sautes d’humeur et une sensibilité accrue au stress.
- ? Baisse des performances scolaires : La fatigue affecte la mémoire, la concentration et la capacité de résoudre des problèmes, ce qui se traduit par de moins bons résultats scolaires.
- ? Troubles du comportement : Les enfants fatigués peuvent présenter des comportements impulsifs, de l’agressivité ou des difficultés à respecter les consignes.
- ? Problèmes de santé physique : Un manque de sommeil affaiblit le système immunitaire, rendant l’organisme plus vulnérable aux infections et aux maladies.
- ? Diminution de la régulation des émotions : La capacité à gérer les émotions est altérée, augmentant le risque de crises de colère et de réactions disproportionnées.
- ? Augmentation du risque de dépression : Un sommeil insuffisant est lié à une augmentation des symptômes dépressifs, notamment chez les adolescents.
- ? Réduction de la motivation : Le manque de sommeil peut entraîner une perte d’intérêt pour les activités quotidiennes et une baisse de la motivation, tant sur le plan scolaire que personnel.
- ? Perturbation de la croissance : Le sommeil est crucial pour la libération des hormones de croissance, essentielles au développement physique des enfants.
- ? Altération des fonctions cognitives : La prise de décision, la résolution de problèmes et la pensée critique sont toutes compromises par un manque de sommeil.
- ✨ Impact sur les relations sociales : La fatigue peut rendre les interactions sociales plus difficiles, entraînant des conflits ou une isolement social.
- ? Difficulté à adopter de saines habitudes de vie : La fatigue rend plus difficile le maintien d’une alimentation équilibrée et la pratique régulière d’exercice physique.
- ✨ Autres.
Sources : Harvard Gazette, 2017. American Academy of Pediatrics, 2019. Hôpital de Montréal pour enfants, 2017.
PORTRAIT 1 – Voici le portrait d’une adolescente qui m’a consultée l’an dernier. Cette histoire est loin d’être exceptionnelle, au sens où c’est très fréquent pour les ados qui me consultent et consultent mes collègues.
Nous sommes en avril. Les parents s’inquiètent pour la réussite académique de leur adolescente de 15 ans. Elle accuse de plus en plus d’échecs et une baisse de résultats scolaires. Au premier rendez-vous, on m’informe qu’elle présente de gros problèmes d’attention au point où l’école recommande une évaluation pour un TDAH. Elle présente aussi des symptômes dépressifs depuis plusieurs mois qui ont conduit à l’administration d’antidépresseurs. Bien que la médication ait amélioré son état, elle ne « remonte pas la pente ». La jeune nomme être incapable d’utiliser les moyens qu’elle connait.
En lien avec le sommeil, je comprends qu’elle dort en moyenne 5 à 6 heures par nuit depuis le mois d’octobre (donc déjà 7 mois). À son âge, les recommandations visent entre 8 à 10 heures par nuit de façon non interrompue. Elle va au lit vers 22h-23h. Elle passe ensuite 2 à 3 heures sur son cellulaire sans que ses parents le sachent. Les parents coupent le Wi-Fi à 23h, toutefois il faut savoir que le Wi-Fi se réactive à minuit automatiquement. Elle s’occupe de 23h à minuit et reprend ses activités en ligne par la suite. Bref, elle s’endort vers 1h du matin (parfois 2h) et doit se lever à 7h pour l’école.
Lorsqu’elle dort son 6h par nuit, elle accuse un manque de sommeil d’au moins 2h par nuit. Du lundi au vendredi, cela représente un manque de sommeil de 10h par semaine. Une nuit entière. Les impacts d’un tel déficit sont importants.
Pour faire très court, les priorités de mes interventions ont été 1) l’instauration d’une hygiène de sommeil et 2) la gestion de ses écrans.
Ce n’est pas sexy dutout pour une ado de 15 ans de travailler sur ses objectifs. J’ai bien pris le temps de lui enseigner l’impact d’un manque de sommeil et de la surexposition aux écrans sur son cerveau et les risques à maintenir ces habitudes de vie. En moins d’un mois, nous avons vu des améliorations considérables sur son humeur, son attention à l’école, le nombre de conflits avec ses parents et sur son anxiété. En juillet, la médication anti-dépresseurs a été retirée par son médecin. Aucune évaluation pour le TDAH n’est considérée en ce moment par son médecin.
Au Québec, on estime qu’environ 34 % des élèves du secondaire âgés de 12 à 17 ans ne dorment pas suffisamment par rapport aux recommandations minimales (Camirand, 2018). Donc, plus d’un sur trois.
PORTRAIT 2 – Voici le portrait d’un enfant de 9 ans. Ses parents me consultent pour des problèmes de comportements à l’école. Ils se chamaillent avec les enfants, ne respectent pas les consignes, refuse les tâches qui exigent des efforts et – surtout – de la persévérance.
À la maison, il ferait d’énormes crises de colère au retour de l’école qui s’étirent en soirée. Il respecterait difficilement les consignes. Il « papillonne » constamment selon le père : on lui demande quelque chose et il se laisse distraite lorsqu’il est en chemin pour aller faire sa tâche (ex. brosser ses dents et finit par jouer avec le chien). Durant ses colères, il lui arrive de frapper ses parents (ou de menacer de frapper) et d’utiliser un langage très grossier. Lors de la mise au lit, il rappelle ses parents plusieurs fois, se relève avec différents prétextes (envie de pipi, soif, peur, dit avoir entendu un bruit, veux vérifier quelque chose dans son sac d’école, etc. …).
En lien avec le sommeil, il s’endort régulièrement vers 22h30. Il doit se lever à 5h30 en semaine. Le vendredi soir, il se couche plus tard (un petit spécial). Il s’endort vers 23h. Le lendemain matin, au bonheur de ses parents, il se lève vers 10h ce qui permet à toute la maisonnée de dormir. Cependant, le dimanche soir, il n’est pas « couchable » puisqu’il s’est levé beaucoup trop tard le matin. Et la semaine recommence …
À son âge, les recommandations visent 9 à 11 heures de sommeil par nuit. Supposant qu’il s’endort à 22h30 et se lève à 5h30, cela ne fait que 7 heures de sommeil. Coupons la poire en deux et allons-y pour un calcul visant le 10h de sommeil par nuit. Il est en déficit d’environs 3h de sommeil par nuit, donc 15 heures par semaine.
Encore une fois, pour faire très court, les interventions ont visé en priorité l’instauration d’une routine de sommeil et de moments de qualité quotidiens avec ses parents. Des moments qui permettent de remplir son sceau d’amour et d’attention et d’ainsi remplir son réservoir de sécurité affective. Ce réservoir est nécessaire à la régulation des émotions. Nous avons aussi instauré des moments de « cool down » à différents moments de la journée à l’école et à la maison, qu’il en ait besoin ou non. Nous avons opté pour la prévention! Cela permet à son système nerveux de relâcher de la pression et d’éviter le débordement ce qui favorise la diminution du stress, la régulation des émotions et l’accès au cortex préfrontal (nécessaire à la gestion des émotions, la résolution de problèmes, la persévérance à l’effort, la gestion de l’impulsivité, l’attention, etc.).
Déjà au rendez-vous suivant, deux semaines plus tard, les parents rapportaient d’énormes améliorations en lien avec l’ajout de moments de qualité parent-enfant. Lorsque le « petit réservoir est plein », la séparation lors de la mise au lit est moins difficile.
En un mois, le nombre de crises à la maison avait beaucoup diminué tout comme le nombre d’interventions en milieu scolaire.
Après quelques semaines, lorsque l’enfant a démontré une plus grande disponibilité émotionnelle, nous avons abordé l’enseignement de stratégies de régulation des émotions, de gestion de conflits et des stratégies de travail. Il parvenait à utiliser l’un ou l’autre des moyens appris au moins 1 fois sur 2.
Voilà. Ces deux histoires sont loin d’être « rares » ou exceptionnelles. Ils sont le quotidien de plusieurs enfants et adolescents en ce moment.
J’ai donc envie de vous rappeler combien le sommeil est CRUCIAL pour la santé physique et psychologique. Le sommeil est nécessaire à la régulation des émotions, à la gestion du stress et de l’anxiété, à la gestion de l’impulsivité, etc. Il a des impacts considérables sur la mémoire, l’attention et la concentration. Il renforce le système immunitaire.
Il est beaucoup trop souvent sous-estimé par les gens qui consultent comme par les intervenants et professionnels qui les accompagnent.
À l’aube de la rentrée scolaire, voici ma plus grande recommandation : mettez votre énergie à établir ou rétablir une routine de sommeil DÈS MAINTENANT.
Beau dodo à tous et à toutes !! ⏰?
Texte par Caroline Quarré, intervenante psychosociale (B.Sc.), conférencière et propriétaire de Service psychosocial Pas-à-Pas